L’évolution des espaces colorimétriques et des technologies d’affichage
Ces dernières années, les principaux fabricants de téléviseurs et de moniteurs ont présenté des dispositifs capables d’améliorer significativement la qualité des images grâce à une fidélité des couleurs accrue et à des niveaux de luminosité jamais atteints auparavant.
Qu’est-ce que l’espace colorimétrique ?
L’espace colorimétrique, ou gamut, représente la combinaison d’un modèle de couleur et d’une fonction de mappage appropriée.
Un modèle de couleur est une représentation mathématique abstraite permettant de définir un système de couleurs.
En pratique, chaque dispositif (écran d’ordinateur, télévision, smartphone, tablette, imprimante…) ne peut reproduire qu’une portion d’un spectre colorimétrique de référence.
Dans la photographie numérique, l’espace colorimétrique aide à comprendre quelles variations chromatiques peuvent être détectées et représentées. Ainsi, l’affichage ou l’impression d’un même contenu sur différents dispositifs peut donner des résultats très variés.
En général, les appareils électroniques ne peuvent pas reproduire la totalité des couleurs visibles par l’œil humain.
Chaque dispositif dispose donc d’une palette de couleurs plus ou moins large permettant de se rapprocher du rendu original.
Alors que le modèle colorimétrique est une représentation abstraite, l’espace colorimétrique est une modélisation plus concrète définissant la combinaison des couleurs primaires à utiliser pour obtenir une teinte donnée, ainsi que la luminosité correspondante.
Origine et évolution de l’espace colorimétrique
Le concept d’espace colorimétrique est né en 1931 lorsque la Commission Internationale de l’Éclairage (CIE) a défini un espace couvrant toutes les teintes visibles par l’œil humain (diagramme de chromaticité).
Graphiquement, l’espace colorimétrique est représenté sous forme de diagramme triangulaire, dont chaque sommet correspond aux trois couleurs primaires du modèle RGB : rouge, vert et bleu.
Le diagramme de chromaticité défini en 1931 est devenu la référence sous le nom de CIE XYZ. Ses axes indiquent les stimuli qui activent les photorécepteurs de l’œil humain sur des longueurs d’onde courtes, moyennes et longues.
Deux couleurs ayant la même valeur XYZ sont perçues comme identiques par l’œil humain.
L’idée du CIE XYZ a été révolutionnaire, car elle permet pour la première fois de décrire les couleurs de manière universelle, indépendamment des appareils utilisés.
Toutefois, cet espace colorimétrique ne reflétait pas précisément les sensibilités visuelles humaines : par exemple, l’œil humain est plus sensible aux teintes de bleu qu’au vert.
Ainsi, en 1976, un nouvel espace colorimétrique a été introduit pour mieux représenter la perception humaine des couleurs.
La troisième dimension de l’espace colorimétrique correspond à la luminosité ou à l’intensité de la couleur. Par exemple, une lumière vive dans une pièce éclairée ou une lumière tamisée dans une pièce sombre peuvent produire une perception similaire. D’où la nécessité d’un paramètre permettant de comparer les couleurs sous différentes intensités lumineuses.
Au fil des années, divers espaces colorimétriques ont été développés pour répondre à différents usages : certains sont basés sur le modèle RGB, tandis que d’autres sont optimisés pour le cinéma, l’informatique, la télévision ou l’impression.
Parmi les espaces colorimétriques standards, on retrouve notamment sRGB, Adobe RGB, ProPhoto RGB, DCI-P3, Rec. 2020 (ou BT.2020).
Comparaison des espaces colorimétriques et performances des écrans
Les différences entre ces espaces résident essentiellement dans l’étendue de leur gamme colorimétrique. sRGB, par exemple, est le plus restreint, tandis que Rec. 2020 est l’un des plus vastes.
L’un des défis pour les fabricants d’écrans est d’étendre les sommets du triangle représentant l’exactitude colorimétrique du dispositif afin qu’ils se rapprochent au maximum des couleurs primaires du spectre de référence.
En parallèle, il est crucial d’améliorer la gestion de la luminosité et de l’étendue dynamique (différence entre le noir et le blanc les plus lumineux affichés).
Étude sur l’évolution de la précision colorimétrique et de la luminosité des écrans (2017-2022)
Une étude réalisée par Palomaki Consulting et publiée dans c’t Magazin – Heise met en évidence l’importance de métriques comme la fidélité des couleurs et la luminosité.
L’analyse se base sur des tests effectués par Rtings sur différents types d’écrans LCD, OLED et QLED.
Les QLED (Quantum Dot LED), bien que basés sur la technologie LCD, sont traités à part car ils améliorent la restitution des couleurs grâce à des nanoparticules (quantum dots). Ces minuscules cristaux modifient le spectre du bleu pour générer une lumière blanche plus pure.
Le graphique issu de l’étude illustre l’évolution de la précision colorimétrique selon les types d’écrans et les années de production. Il montre les progrès significatifs réalisés en seulement quelques années.
Palomaki a examiné uniquement les espaces colorimétriques DCI-P3 et Rec. 2020, qui sont devenus des références pour les écrans haut de gamme.
Les zones grises du graphique indiquent les écrans couvrant au moins 90 % de ces espaces colorimétriques.
Une couverture supérieure à 90 % pour Rec. 2020 est un objectif très ambitieux qu’aucun écran commercialisé n’a encore atteint.
En revanche, tous les téléviseurs OLED produits depuis 2016 dépassent 90 % de couverture du DCI-P3, leur permettant d’être classés dans la catégorie Wide Color Gamut (WCG).
Les TV QLED sont également performants : la plupart dépassent les 90 % du DCI-P3. Seule exception, Samsung, dont environ la moitié des modèles testés sont légèrement en dessous de ce seuil.
Concernant Rec. 2020, la tendance rappelle celle observée auparavant avec DCI-P3 : deux modèles QD-OLED frôlent les 90 % de couverture, tandis que les autres OLED se situent autour de 70 à 75 %.
Analyse de la luminosité des téléviseurs
Le graphique sur la luminosité indique que les écrans LCD et QLED possèdent une large plage de contrôle de la luminosité, avec certains QLED atteignant 1 000 nits ces dernières années.
Les OLED, bien qu’excellents en rendu colorimétrique, ont toujours été moins performants en luminosité. Toutefois, la situation a évolué en 2022 avec l’arrivée des QD-OLED et les avancées de LG avec la technologie OLED.EX, qui utilise le deutérium pour améliorer la luminosité tout en garantissant une meilleure efficacité énergétique.
Enfin, Palomaki s’est intéressé au volume colorimétrique, un paramètre combinant saturation, teinte et luminosité. Ce facteur est essentiel pour une restitution optimale des contenus HDR.
Un volume colorimétrique plus élevé signifie qu’un écran peut afficher une large gamme de couleurs sous différentes intensités lumineuses.
Conclusion
L’étude montre que, d’année en année, la fidélité colorimétrique, la luminosité et le volume des couleurs s’améliorent considérablement, y compris sur les écrans LCD d’entrée de gamme.
Les QD-OLED apparaissent comme les plus avancés, offrant une combinaison optimale entre couleur et luminosité.